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Article juridique : Environnement


#ENVIRONNEMENT : Quelles sont les obligations du préfet en cas d’annulation d’une dérogation à l’interdiction de détruire les espèces protégées ? (Conseil d'État, 6ème - 5ème chambres réunies, 28/04/2021, 440734)

Par deux arrêtés, le préfet du Doubs avait autorisé une société à exploiter une carrière de roches massives calcaires après lui avoir délivré une autorisation de dérogation au régime de protection des espèces en application de l'article L. 411-2 du code de l'environnement.

 

Suite à l’annulation juridictionnelle par le tribunal administratif de Besançon de cette autorisation en raison d’une insuffisance de motivation, le préfet a délivré une nouvelle autorisation de dérogation qui a également été annulée par un jugement devenu définitif, cette fois au motif que la dérogation accordée n'était pas justifiée par une raison impérative d'intérêt public majeur au sens de l'article L. 411-2 du code de l'environnement.

 

Suite à cette dernière annulation, le préfet a alors mis en demeure la société de régulariser sa situation, soit en soit en cessant son activité, soit en déposant une nouvelle demande d'autorisation environnementale pour tenir compte de l'annulation de la dérogation au régime de protection des espèces. Le préfet a également suspendu le fonctionnement de la carrière jusqu’à la mise en œuvre de cette régularisation.

 

La société a alors, comme le permet l’article L.521-1 du code de justice administrative, formé un référé-suspension contre l’exécution de ces mesures. Suite à la suspension de cet arrêté, la ministre de la transition écologique et solidaire se pourvoit en cassation contre l’ordonnance du tribunal administratif de Besançon.

 

 

Quelles sont les dispositions applicables ?

 

- l'article L. 511-1 du code de l'environnement relatif aux installations classées pour la protection de l'environnement dispose que : « Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d'une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique. / Les dispositions du présent titre sont également applicables aux exploitations de carrières au sens des articles L. 100-2 et L. 311-1 du code minier »

 

- l’article L.512-1 du code de l’environnement ajoute que « Sont soumises à autorisation les installations qui présentent de graves dangers ou inconvénients pour les intérêts mentionnés à l'article L. 511-1. / L'autorisation, dénommée autorisation environnementale, est délivrée dans les conditions prévues au chapitre unique du titre VIII du livre Ier ».

 

- l'article L. 411-2 du code de l'environnement, relatif à la protection des espèces naturelles  dispose quant à lui que : « I. - Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions dans lesquelles sont fixées : / (...) 4° La délivrance de dérogations aux interdictions mentionnées aux 1°, 2° et 3° de l'article L. 411-1, à condition qu'il n'existe pas d'autre solution satisfaisante, pouvant être évaluée par une tierce expertise menée, à la demande de l'autorité compétente, par un organisme extérieur choisi en accord avec elle, aux frais du pétitionnaire, et que la dérogation ne nuise pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle : (...) / c) Dans l'intérêt de la santé et de la sécurité publiques ou pour d'autres raisons impératives d'intérêt public majeur, y compris de nature sociale ou économique, et pour des motifs qui comporteraient des conséquences bénéfiques primordiales pour l'environnement (...) ».

 

- l’article L.181-1 du code de l’environnement dispose que « L'autorisation environnementale est applicable aux activités, installations, ouvrages et travaux suivants, lorsqu'ils ne présentent pas un caractère temporaire / : (...) 2° Installations classées pour la protection de l'environnement mentionnées à l'article L. 512-1 ».

- L'article L. 181-3 du code de l’environnement prévoit notamment que « l'autorisation environnementale ne peut être accordée que si les mesures qu'elle comporte assurent également : / (...) 4° Le respect des conditions, fixées au 4° de l'article L. 411-2, de délivrance de la dérogation aux interdictions édictées pour la conservation de sites d'intérêt géologique, d'habitats naturels, des espèces animales non domestiques ou végétales non cultivées et de leurs habitats, lorsque l'autorisation environnementale tient lieu de cette dérogation ; (...) »

 

- enfin, l’article l'article L. 171-7 du code de l'environnement : «  Indépendamment des poursuites pénales qui peuvent être exercées, lorsque des installations ou ouvrages sont exploités, des objets et dispositifs sont utilisés ou des travaux, opérations, activités ou aménagements sont réalisés sans avoir fait l'objet de l'autorisation, de l'enregistrement, de l'agrément, de l'homologation, de la certification ou de la déclaration requis en application des dispositions du présent code, ou sans avoir tenu compte d'une opposition à déclaration, l'autorité administrative compétente met l'intéressé en demeure de régulariser sa situation dans un délai qu'elle détermine. / Elle peut édicter des mesures conservatoires et suspendre le fonctionnement des installations et ouvrages ou la poursuite des travaux, opérations ou activités jusqu'à ce qu'il ait été statué sur la déclaration ou sur la demande d'autorisation, d'enregistrement, d'agrément, d'homologation ou de certification. (...) ».

 

 

Cet arrêt à mentionner au Lebon est l’occasion pour le Conseil d’Etat de préciser les obligations du préfet en cas d’annulation d’une dérogation à l’interdiction de détruire des espèces protégées.

 

- Il précise tout d’abord que lorsque l’autorisation prévue à l’article L. 411-2 du code de l’environnement a fait l’objet d’une annulation juridictionnelle, il appartient au préfet de mettre en oeuvre les pouvoirs qu'il tient de l'article L. 171-7 du code de l'environnement en mettant l'exploitant en demeure de régulariser sa situation dans un délai qu'il détermine et, le cas échéant, en édictant des mesures conservatoires pouvant aller jusqu'à la suspension de l'exploitation de l'installation en cause jusqu'à ce qu'il ait statué sur une demande de régularisation.

 

-Lorsque le préfet est saisi d’une demande de régularisation, il doit alors statuer en tenant compte de la situation de droit et de fait applicable à la date à laquelle il se prononce, notamment en tirant les conséquences de la décision juridictionnelle d’annulation et de l'autorité de chose jugée qui s'y attache, le cas échéant en abrogeant l'autorisation d'exploiter ou l'autorisation environnementale en tenant lieu.

-  Dans l’hypothèse où, en raison des travaux réalisés notamment sur le fondement de la dérogation au régime de protection des espèces protégées prévue à l’article L. 411-2 du code de l’environnement avant qu’elle ne soit annulée pour un motif de fond, la situation de fait, telle qu’elle existe au moment où l’autorité administrative statue à nouveau, ne justifie plus la délivrance d’une telle dérogation, il incombe cependant au préfet de rechercher si l’exploitation peut légalement être poursuivie en imposant à l’exploitant, par la voie d’une décision modificative de l’autorisation environnementale si elle existe ou par une nouvelle autorisation environnementale, des prescriptions complémentaires. Ces prescriptions complémentaires comportent nécessairement les mesures de compensation qui étaient prévues par la dérogation annulée, ou des mesures équivalentes, mais également, le cas échéant, des conditions de remise en état supplémentaires tenant compte du caractère illégal des atteintes portées aux espèces protégées, voire l’adaptation des conditions de l’exploitation et notamment sa durée.

 

 

 

En l’espèce, la société faisait valoir que l’exploitation de la partie sud du site ne nécessitait pas une nouvelle dérogation dès lors que cette zone ne comportait plus d'espèces protégées. En effet, cette zone avait été défrichée et décapée jusqu'au toit du gisement sur le fondement d'une autorisation de défrichement devenue définitive et de la dérogation alors en vigueur.

 

Cependant, en vertu des précisions apportées par le Conseil d’Etat, cette circonstance ne fait pas obstacle à ce que le préfet, dans l'attente que l'autorisation environnementale soit, le cas échéant, complétée, mette en oeuvre les pouvoirs qu'il tient de l'article L. 171-7 du code de l'environnement en édictant des mesures conservatoires, afin de tenir compte notamment des atteintes portées aux espèces protégées sur le fondement de la dérogation illégale, et en suspendant le fonctionnement de l'installation en cause.

 

Dès lors, la mise en demeure du préfet ne paraît pas de nature à créer un doute sérieux sur sa légalité.

 

L’ordonnance du tribunal administratif de Besançon est annulée.

 

Lire l’arrêt dans son intégralité : https://www.legifrance.gouv.fr/ceta/id/CETATEXT000043456957?init=true&page=1&query=440734+&searchField=ALL&tab_selection=all

 

 

 

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